mardi 22 septembre 2009

Partir **(*)


Partir. Ce n'est pas une question. C'est une affirmation.
Thèse fémisniste ici mise en lumière par Catherine, Breillat me demanderez-vous, Corsini (La nouvelle Eve, la répétition) vous répondrais-je.
Nous avons définitivement quitté le ton rigolard qui s'amusait de la crise de la trentaine, pour un ton plus affirmé; plus dur, plus féministe, plus érotique. Le film explore deux relations, deux sentiments. D'un côté, l'épouse mère, rompue aux tâches ménagères, lié à un mari charmant au sens matérialiste du terme. De l'autre, la femme, qui s'ennuie, qui est dévalorisée en permanence, dépendante, qui épouse les projets de son mari et de ses conceptions toutes faites de la réussite, face à ses désirs d'ailleurs, d'autre chose, de quelqu'un d'autre. Ce film Doillon l'aurait peut être appelé "Le premier venu".
Kristin Scott Thomas a été choisie pour incarner cette femme qui décide de prendre son destin en main, de démarrer une nouvelle vie, de façon très égoïste certes, mais elle n'y peut rien dit-elle, c'est plus fort qu'elle. Elle est objet de désir, mais surtout sujette à désir. Corsini aime à en explorer l'intensité , qu'elle projette sur cet ouvrier (Sergi Lopez) juste sorti de prison, aux aspirations poétiques, dans une photographie certes crue mais qui doit retranscrire la passion corporelle, le partage des corps.




A contrario, les scénes conjugales laissent place à un plaisir à l'initiative, aucunement partagé. L'amour pour le docteur richissime et possessif, Yvan Attal en amoureux trompé, au comportement dominant, pour ne pas dire castrateur, est parti.

Le personnage de Kristin Scott Thomas décide elle aussi de partir.
L'intérêt du film pourrait résider dans le dilemne de la relation, ou dans l'opposition des deux sentiments. Mais à dire vrai, seule une seule des deux relations s'imposent à nous avec justesse, l'autre nous décoit davantage, avec une impression de déjà vu ailleurs, voire de cliché.
Oui, la relation qui mérite le détour est celle entre le mari et la femme (à moindre titre celle entre la mère et ses enfants); notamment certaines scènes sont très fortes; les larmes d'Yvan Attal y sont peut être pour quelque chose. Certains diraient que ces scènes sont belles; belles dans leur extrême dureté, dans leur radicalité, et peut être principalement dans leurs douleurs exposées, aux consonnances réelles, dans une société française où le destin féminin s'impose de plus en plus à lui même, où les femmes refusent de plus en plus souvent la soumission que les hommes leur ont imposé en grand naturel.
On se posera la question de l'inspiration de Catherine Corsini, on s'interrogera sur la volonté de filmer cette émancipation.

samedi 19 septembre 2009

Fish Tank ***


Fish Tank est le second film anglais d'Andrea Arnold après Redroad. Il a reçu le prix du jury au dernier festival de cannes ... un prix amplement mérité. Fish tank c'est l'histoire d'une adolescente de 15 ans, Mia qui vit dans une banlieue morne de l'Essex à l'est de Londres, avec sa mère qui l'éleve seule et sa petite soeur. Mia est une dure à cuire, une rebelle. Les premiers plans du film tournés caméra à l'épaule nous la montrent instable, sauvage, s'exprimant avec un langage de charretier, cherchant dans sa cité une autre jeune fille pour finalement aller lui coller un coup de boule en pleine tête. Nous avons donc à faire à un caractère bien trempé. De plus les relations familiales ne sont pas réellement au beau fixe avec une mère peu aimante et une petite soeur qui manie la langue anglaise comme elle. Au premier abord, on se sent donc proche d'un cinéma social à la Ken Loach, une cité délaissée, des problèmes familiaux, un personnage écorché. Deux évenements vont cependant faire basculer l'histoire : l'intérêt de Mia pour la danse Hip Hop et l'arrivée dans la famille du nouvel amant de sa mère.

La plus belle partie du film naît de cette rencontre entre le nouvel amant de sa mère et Mia. Lui est un homme très sexy et elle une adolescente pas vraiment consciente de sa féminité. L'homme est interprété par Michael Fassbender qui a déja joué dans Hunger de Steve Macqueen ou encore dans le dernier Tarantino. Elle va lui faire partager sa nouvelle passion pour la danse Hip hop tandis que lui va s'imposer auprès d'elle comme un père de substitution, un confident voire un amant potentiel .

Sans lorgner vers la comédie sentimentale, le film va s'aventurer à nous décrire un éveil sensuel naissant chez la jeune femme et va alimenter l'histoire d'un certain érotisme très bien rendu dans des plans au ralenti où les respirations se font entendre où Mia semble finalement apaisée. La découverte du désir chez cette jeune femme rend bien compte de la vulnérabilité des adolescents et de toute la sensualité que peut récéler cet âge là.

Ce n'est pas un film social de plus, Andrea Arnold prend des chemins de traverse et nous raconte avant tout l'histoire d'une jeune femme qui va apprendre à se découvrir. On peut encore vanter les mérites de cette jeune actrice de 17 ans Katie Jarvis qui illumine le film quand elle sourit (rarement) et la comparer aux révélations qu'ont pu etre Emilie Dequenne dans Rosetta ou encore Sandrine Bonnaire dans "à nos amours".

On peut également noter que le titre du film signifierait un poisson dans un aquarium bien que la réalisatrice dit bien qu'il n'ya pas de sens définis au titre .

samedi 12 septembre 2009

Singularités d'une jeune fille blonde **

Il ne reste guère que Manoel De Oliveira. Nos autres grands maîtres, défenseurs du cinéma intellectualisé, quasi centenaires, ont disparu l'année dernière, presque l'un après l'autre (Antonioni, Bergman). Monsieur Oliveira nous livre régulièrement sa réflexion de l'année, et questionne la culture. Cette fois-ci, il s'arrête sur une réflexion de Pessoa, le temps d'une nouvelle adaptée, pour mettre en illustration cette pensée: "Tout le mal du monde vient de ce que nous nous intéressons aux autres". Et la forme mérite commentaires ! Nous sommes premièrement très surpris de l'aspect narratif, qui nous rappelle un peu Bergman; nous spectateurs, en même temps qu'une dame dans le bus, sommes invités à entendre les malheurs qui sont arrivés à un jeune amoureux. Etrange intemporalité de ce film, pourtant sans référence chronologique marquée, mais les comportements rigides, presques risibles, sonnent désuets. Parfois, on pense à Dom Quichotte. La forme, c'est surtout celle d'une bluette que se permet le maître, on pense encore à "l'anglaise et le Duc" de Rohmer, autre spécialiste du désuet, en plus accessible cependant. Sans musique qui plus est. Ici la forme est volontairement courte, seulement une heure, un petit film de chambre pour un compositeur habitué aux symphonies, une nouvelle pour un écrivain goncourisé. Une petite fable, étrange et légèrement subtile, qui prend le temps d'exposer quelques vers de Pessoa, autre référence obligatoire de la culture lisutanienne, mais surtout une fable farce, clin d'oeil, ironique. Quelle charmante façon de filmer une embrassade ! Les visages, pourtant mis en valeur dans de nombreux portraits arrêtés, sont ici oubliés, pour laisser place à un jeu de pied évocateur. Ellipse charmante.
L'actrice principale, Catarina Wallenstein, au minois qui nous rappelle tout à la fois Britney Spears et Hélène de Fougerolles, est une inconnue en France, et n'est pas une habituée d'Oliveira, au contraire de son petit fils, Ricardo Trepa. Elle joue posée, gracieuse et élégante. On s'amuse de la quête amoureuse du jeune homme, qui très rapidement en vient à des projets de mariage, son but ultime qui lui vaut déboires et désillusions; l'homme fauché, mis dans la rue et à pied par son Oncle protecteur et influent, outré des projets de mariage, rencontre un bienfaiteur qui lui vaut fortune dans un premier temps, mais lui reprend tout aussitôt, profitant de sa naiveté.

 La providence repasse par là, la fortune l'attend de nouveau au Cap vert, et l'oncle rigide vire soudainement et réintroduit son brillant neveu; le tapis rouge au mariage et au projet de bonheur ! Quel bonheur ? Et très brièvement, très légérement même, l'ironie du sort ressurgit, et la pensée de Pessoa est mise en abîme avec un train qui passe, mais ne s'arrête pas. Rigolo. Au final, Oliveira nous livre ici un récit léger et accessible, presque didactique de son oeuvre entière.

Aucun regret ***

L'ennui pouvait ennuyer. La plastique était belle, Sophie Guillemin moins, mais son jeu sonnait étrange et tout ou presque reposait sur cet échange avec un Berling plutôt atone et désirant.
La rencontre entre un acteur professionnel et une amatrice, un choc des contraires, dans le casting et à l'écran.
Le nom Cédric Kahn s'était imposé, la critique a su voir l'esthète.
Quelques années plus tard, le désir interroge de nouveau le réalisateur, toujours aussi attiré par les conflits internes, les pulsions amoureuses, l'épanouissement corporel. Mais cette fois-ci, Cedric Kahn s'intéresse aux regrets du désir, à une mémoire d'un désir, et la liberté de création permet de réveiller les émois enfouis, refoulés. Il offre à Yvan Attal, bien loin de ses compositions récentes ou plus anciennes, d'adolescent turbulent (Aux yeux du monde), l'occasion de briller en amoureux retrouvé, en homme fougueux qui se réveille soudainement pour redonner sens à sa vie. Ce rôle est assez fort.
Surtout, à la différence de l'ennui, Kahn nous étonne en peignant des personnages expressifs, passionnés, et empreints de sentimentalité. La peinture n'est pas uniquement statique, elle est dynamique, au point que Cedric Kahn lui même considère son film comme un film d'actions !
Les évènements romanesques s'enchaînent, alors que nous restons pour autant dans un cinéma de gestes, où les silences et les expressions; à l'image d'un Bresson; composent eux aussi un dialogue, une histoire.
De nombreux plans s'arrêtent, et tour à tour nous saisissent, nous glacent, nous interloquent, nous interrogent. Nous sommes dans un cinéma en mouvement, entraînés dans une fuite plutôt effrénée dont l'issue nous est inconnue; il en émane la naissance d'un suspens que la musique stridente de Philip Glass entretient.
La recette est pourtant connue, Kahn dit l'emprunter pour partie à Truffaut et à "la Femme d'à côté", sur cette question du retour du passé enfouie , dont le deuil n'a jamais été fait, dans le présent, mais aussi dans cet amour interdit, qui rapproche deux être très différents et quelque part complémentaire. Yvan Attal campe Mathieu, un "terrien", architecte à l'ambition mesurée, rangé dans son quotidien professionnel qu'il partage avec son épouse presque à son image, jouée par l'intéressante Arly Jover, que l'on avait aperçu notamment dans "le voyage aux Pyrénées", le film des frères Larrieu, qui réunissait aussi au casting Philippe Katerine . Il avance jusqu'alors dans la vie avec certitude, et veut maîtriser son destin; il prend les décisions, vit dans le présent.
Valeria Bruni Teddeschi, Maya,  incarne elle une jeune femme qui se laisse envahir par ses instincts, se laisse guider par la vie, ici ou là; elle subit la vie, ses aléas. Le passé lui a valu infortune; elle s'accroche à des projets qui ne sont pas les siens. Sensuelle, énigmatique, incohérente, animée; son personnage est mystérieux. La demie-sœur de Carla Bruni nous rappelle ici son rôle dans "Les gens normaux n'ont rien d'exceptionnel"de Laurence Ferreira Barbosa, au scénario duquel avait participé un certain Cedric Kahn.

Tous deux se sont aimés dans leur prime jeunesse, d'un amour ambitieux, difficile; le désir les envoûte, les dépasse, leur fait peur. La cristallisation Stendahlienne s'éternise, les doutes ne laissent pas place aux certitudes, l'union fait naître la douleur de l'absence, la nécessité de la fuite.
La fuite qui permet le retour au calme, à la stabilité, bien loin des projets d'aventure.
Le film raconte la résurgence subite de cet amour dans l'esprit de Mathieu; perturbé par la mort de sa mère à laquelle il assiste. Il en souffre. Les images du jeune Mathieu restent en lui; il se sépare des choses qui restent, de quelques mémoires, mais souhaite toujours honorer et respecter son passé, et ne pas vendre les biens de ses parents, alors que son frère qui a depuis longtemps tourné la page ne s'embarrasse pas de pareil sentimentalité; et le lui fait bien savoir dans un reproche cinglant. Mathieu a réussi "en apparence" semble-t-il lui dire, le fragilisant peut être dans ses certitudes auxquelles il se raccroche, notamment dans cet amour qu'il a "bien sûr" pour sa femme. La fragilité le rattrape dés qu'il voit Maya ...
La suite et la fin, nous ne la regrettons pas. Le cinéaste fait preuve d'une belle qualité narrative, d'un esprit romanesque animé; il prend soin d'éviter d'apitoyer sa caméra sur les victimes de ce jeu d'adultère, avec une certaine élégance pour rester sur son sujet; et surtout il conclut sur une ellipse qui nous fait dire que plus que jamais les regrets sont éternels.
A tout vous dire, si Kahn pense à une trilogie après "l'ennui" et "les regrets", conseillons lui "les remords".

Place ici à la bande annonce de ce bon film, qui laisse place à de multiples lecture.


mercredi 9 septembre 2009

THIS IS IT

samedi 5 septembre 2009

Un prophète * de Jacques Audiard : descendons

Il m'en vient à comparer "Un prophète" d'Audiard avec l'Alchimiste de Cuehlo, quand plus logiquement j'eus du m'en référer au Prophète de Gibran. Le "prophète" d'Audiard et "l'alchimiste" bénéficient tous deux d'une critique dithyrambique, pour ne pas dire conciliante. Est-ce un sacrilège que d'oser émettre un avis contraire jusqu'à remettre en cause la qualité même de l'une et l'autre oeuvre ?
En tout cas, ce ne puit être une prophétie, puisque le succès d'estime apparaît trivial.

Le meilleur film de la croisette, entends-je ici, livre magnifique, plein de sagesse, d'apprentissage lis-je là, acteur magnifique entends-je encore.

La comparaison est bel(le)et bien douteuse, n'en doutez pas, les deux oeuvres n'ont de semblable que l'accueil critique qu'elles reçoivent, tandis que l'un s'apparente à un conte enfantin simpliste et naïf; l'autre ressemble bien plus à un sinistre pamphlet abracadabrant. Livrons-nous à un réquisitoire qui laissera insensible les seuls non amateurs, et n'épargnera par contre pas les retranchés, les éperdus aficionados du nom Audiard, car je suppose que la filiation avec le parolier des tontons flingueurs joue pour beaucoup dans la notoriété de son fils, même si évidemment la critique l'attendait au virage. Bon, évidemment l'exagération discrédite quelque peu le propos, et le radicalisme mais aussi la simplicité du raisonnement invitent à se retrancher bien plus encore derrière cette certitude que Jacques Audiard est un grand.

Seulement, je veux ici justement démontrer que "Un prophète", adaptation de "Le prophète" d'Abdel Raouf Dafri, use lui aussi de procédés tout aussi malhonnêtes, à commencer par cette prison, lieu et thème, montée de toute pièce pour l'occasion.

Le film prend ensuite le parti du sérieux. Et sérieusement il ennuie dés le départ.

Ce film souffre d'un manque de nuance flagrant. Tout y est grossier, les grosses ficelles se succèdent les unes aux autres. Nous sommes otages. Le scénario alambiqué ne charme nullement. Audiard a sans aucun doute de quoi être infatué tant la critique est unanime envers lui, et univoque.
Tel Patrick Juvet je me demande où sont les femmes. Absence de passions, de sentiment même. Alors on se dit que le film porte à réflexion. Touché couché, point nenni ...
Je résume: Le méchant arabe va en prison mais on est pas sur qu'il est si méchant, et un méchant corse qui sait tout façon président super star, (mais il n'a donc rien d'autre à faire que de savoir ?) lui dit de tuer un méchant arabe sinon il le tue. Il est très très méchant, et faut pas qu'on le regarde quand il parle. En échange il va le protéger notre méchant qu'on croit gentil et l'embrigader dans son gang. Une fois dans son gang, on voit bien qui est le chef, mais le petit chef aimerait bien devenir chef de gang aussi. La guerre des corses et des arabes aura-t-elle lieu ? Mince alors, un corse traficote avec les italiens, et le trafic de cannabis organisé par les arabes pose souci à notre méchant héros qui ressemble à Debouze de visage. Le petit chef trahira le grand chef, histoire de lui montrer que le renouvellement des générations n'attend pas le papy-boom.
Quand je vous dis que le scénario étourdit ...

Bref, digne de Mesrine ce synopsis.
Audiard cite ici "Scarface" en contre référence, ou encore "Le parrain" en modèle. Il avoue son background limité sur les films du genre, "un condamné à mort" s'est échappé (dommage que l'on ne puisse vraiment pas faire la comparaison), les signés Giovanni dont il souligne l'éloignement, et dit encore ne pas connaître des séries américaines dont le nom n'est pas pourtant pas forcément connu du plus grand nombre.

Taisons la violence, elle est tout aussi choc que particulièrement inutile, en ce qu'elle n'est pas le véritable sujet.

Alors il peut rester la qualité esthétique. Où est elle ? Dans la couleur marron du sang peut être, c'est ma foi mieux que le rouge vif d'Argento. Plus sérieusement, les portraits sont quand même assez saisissants, notamment ceux d'Arestrup.


Quant au sujet, est-il finalement l'incarcération ? Doutons-en.

On nous dira que le film réinvente le genre, que le jeu des acteurs, bien plus Rahim le bleuet qu'Arestrup le vétéran, finalement peu cité, resplendit.

Oui, mais non.
Ceci est bien entendu subjectif, et disons-le quand même; ce billet se veut très subjectif lui aussi et est certainement teinté d'une part de mauvaise foi consécutive de la simple déception que fut la mienne face à ce Grand prix du Jury Cannois, ma foi, fort austère.

Le film plaît aux critiques, il plaira bien entendu à d'autres, mais vous l'aurez compris, je ne suis pas.

Un Prophète : Bande-annonce (VF)

jeudi 3 septembre 2009

Inglorious basterds ****: Tarantino retrouvé puis de nouveau perdu

Excellent film!
Voilà ce que l'on dirait d'Inglorious Basterds, après avoir vu la première heure et demie. Un cinéma intelligent, fin, presque nuancé ! Des dialogues très bien sentis, une justesse de ton étonnante pour un propos tout à la fois caustique et grave. Un film particulièrement bien renseigné, fouillé. Il en ressort un plaisir visuel et sensuel, nous voyons un très bon film, Quentin Tarantino nous reprouve son talent, s'affirme en très bon cinéaste, son génie ne fait pas de doute. Nous sourions plus que nous rions, mais nous sommes captivés, stupéfaits, admiratifs parfois devant les plans, discours, situations, le tout avec un brio manifeste pour tout ce qui touche au rythme, tel un morceau de musique talentueux, le rythme oscille entre accélération, exposition lente, le tout dans un mouvement de caméra parfois cinglant, parfois rotatif, parfois contemplatif.
Parfaite maîtrise et grande justesse. Les références européennes et cinéphilliques de Tarantino sautent aux yeux. Le propos est décousu, la reconstruction historique étonnante, les scalps nous apportent un brin de violence visuel, prétexte au comique.
Quel gâchis !
Est-on pourtant tenté de dire si l'on considère la dernière demie-heure, ou tout explose, ou le scénario tenu se transforme en déferlement de n'importe quoi, certes burlesque, mais oh combien destructeur de l'entreprise de départ. Kill Bill revient au galop, il faut que ça gicle, que le sang coule, que le show soit total, sans recherche de sens,que l'action soit pleine ! Tant pis pour la trame de départ, elle était prétexte à ce grand show où le délire est roi, où la folie assassine s'empare de tous, et tant qu'à revisiter l'histoire, brûlons Hitler, mais pas seulement. Notre bon idiot de service, notre grimaçant Brad Pitt, à la manière d'un Travolta raffolant de Burgers, se cantonne dans un mimétisme simple, dans une ritualisation de ses actions.




Quand l'action et l'usuel viennent à supplanter le fondement de celle-ci, où l'un des procédés comiques dont s'amuse à tord et à travers Quentin Tarantino. Il s'amuse lui de plus en plus. Mais nous de moins en moins.
Au final, ce film nous apparâit bon, les acteurs français, à commencer par Mélanie Laurent, nous apportent une belle composition, Diane Kruger sonne elle aussi juste, nous rappelant que la consonnance germanique de son nom de famille n'est pas usurpée.




Les acteurs américains nous font sourire, le scénario est osé, et la façon de revisiter l'histoire finalement très novatrice. On vous a tout dit sur 39-45, oui, mais si on vous disait ce qui ne s'est pas passé exactement comme ça ?


Belle initiative, dommage finalement que Tarentino ait cherché la conciliation entre deux publics très différents(et pourtant l'entreprise est louable, et parfois réussit à d'autres talentueux cinéastes), les amateurs de pur divertissement et ceux qui se raccrochent à leur vision plus sélective de l'art, plus exigeants sur l'esthétique général, qui aime à retrouver dans les compositions qu'on leur soumet des composantes, dirons-nous, intellectualisantes.